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samedi 10 janvier 2015

Message de noël des Évêques du Congo

«Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime» (Lc 2,14).









A tout le peuple de Dieu, Aux femmes et aux hommes de bonne volonté,Chers filles et fils du Congo,
A la veille de Noël, fête de la Nativité de Notre Seigneur Jésus-Christ, Nous, Evêques, réunis au sein de la Conférence Episcopale du Congo (CEC), vous adressons un message de paix et de joie. Que notre message rejoigne chacun et chacune de vous, partout où il se trouve, pour vous manifester notre proximité comme Pasteurs et guides du Peuple de Dieu que vous êtes.



1- Depuis quelques temps a surgi, dans notre pays et dans beaucoup d’autres pays du continent, le débat sur le changement ou la révision de la Constitution. Ce débat suscite, à juste titre, au niveau de la classe politique, beaucoup de passions et de réactions, au point d’occulter les vrais problèmes sociaux concernant la vie de nos populations!
2- Nous voulons ainsi inviter tous nos compatriotes à en débattre sereinement, dans la vérité et dans la liberté. La liberté qui est «le droit de faire tout ce que les lois permettent» (1). En tant que Pasteurs, avant tout, nous invitons l’ensemble de la classe politique de notre pays à un sens élevé de la responsabilité. Aux femmes et aux hommes politiques de notre cher et beau pays, ainsi qu’à tous les Congolaises et Congolais, nous disons: malheur à nous, si le sang et les larmes coulent encore dans notre pays.
3- Plus on approche de l’élection présidentielle de 2016, plus le climat social se dégrade, ce qui plonge notre peuple dans un malaise profond et la peur. Dans le même temps, le débat sur le changement ou le maintien de l’ordre constitutionnel s’intensifie. Faut-il changer ou maintenir l’ordre constitutionnel? Quelles sont les raisons qui militent pour ou contre le changement de notre Loi Fondamentale?

1- Notre mission de Pasteurs

4- Le débat sur le changement ou la révision de la Constitution est politique. A ce titre, il concerne l’ensemble des Congolais, chacun selon sa situation sociale et son rang. En ce qui nous concerne, en vertu de notre mission prophétique, «l’Eglise se place, concrètement, au service du Royaume de Dieu» (2), en invitant continuellement les décideurs politiques à privilégier l’intérêt général et la gestion du patrimoine national pour le bien de tous, à «promouvoir dans la société une culture soucieuse de la primauté du droit» (3) et du dialogue.
5- Pour cela, elle apporte, constamment, au monde, la lumière de l’Evangile et de sa Doctrine Sociale. Et comme le déclare le Concile Vatican II, dans sa constitution pastorale Gaudium et Spes: «L’Eglise ne se confond pas avec la communauté politique et n’est liée à aucun système politique. La communauté politique et l’Eglise, chacune dans son propre domaine, sont, en effet, indépendantes et autonomes l’une de l’autre et sont toutes deux, bien qu’à des titres divers, au service de la vocation personnelle et sociale des mêmes hommes» (4). C’est pour cela que nous tenons à lever les équivoques et, à notre tour, à nous adresser à l’ensemble de notre peuple, pour préserver l’intérêt général et  l’unité nationale: «Oublions ce qui nous divise, soyons plus unis que jamais», chantons-nous dans notre hymne national «La Congolaise».

2- Appel pressant à la classe politique congolaise

6- Nous, Evêques du Congo, voulons, tout d’abord,  exprimer, à chacune et à chacun, notre estime et notre gratitude pour votre engagement dans la gestion des affaires du pays.
Récemment, aux Journées mondiales de la jeunesse, à Rio, au Brésil, le Pape François affirmait: «Lorsqu’un responsable me demande un conseil, ma réponse est toujours la même: dialogue, dialogue, dialogue. Entre l’indifférence égoïste et la protestation violente, il y a une opinion toujours possible: le dialogue». Le dialogue politique constitue la pierre angulaire de toute vraie démocratie. Il vous revient d’inscrire notre pays dans la modernité, la prospérité, parmi les grandes nations.
7- Sans méconnaître tous les efforts fournis par nos dirigeants pour améliorer les conditions de vie de nos concitoyens, il faut admettre que beaucoup reste encore à faire, particulièrement dans le domaine de la santé, de l’éducation, de l’alimentation, et d’une manière générale, de l’accès égal aux biens et aux services sociaux.  A tous et à chacun, nous disons: «Dieu a  destiné la terre et tout ce qu’elle contient à l’usage de tous les hommes et de tous les peuples, en sorte que les biens de la création doivent équitablement affluer entre les mains de tous, selon la règle de la justice, inséparable de la charité» (5).

3- Appel à la force publique

8- Il ne nous revient, naturellement pas, de vous rappeler les missions régaliennes qui sont les vôtres, au service du peuple et de la nation. Qu’il nous suffise, néanmoins, de vous rappeler que le peuple congolais a toujours su compter sur vous au tournant les plus critiques de son histoire. Il veut, cette fois-ci également, pouvoir compter sur votre détermination à garantir les valeurs cardinales qui régissent notre nation. Le peuple congolais vous est particulièrement reconnaissant pour votre contribution indéniable au rétablissement et au maintien de la paix dans notre pays. Il vous sera encore plus reconnaissant dans la sauvegarde de cette paix, en disant non à toutes formes de violence susceptibles de perturber la paix sociale. Nous en appelons donc à votre haute conscience du devoir: vous êtes la force publique garante de la sécurité de la nation. Nous osons donc espérer que vous ne ménagerez aucun effort, en cette période où notre pays se trouve à nouveau dans une phase déterminante de sa jeune démocratie, pour préserver la justice, la vérité, la paix et l’unité nationale.

4- Révision ou changement de la Constitution!

9- Loin d’être seulement un moyen d’institutionnaliser le pouvoir, la Constitution est également un moyen de le limiter, de l’encadrer. Une Constitution, c’est un esprit, des institutions, des pratiques… Une vraie démocratie suppose, comme le suggère la Déclaration universelle sur la démocratie: «…que les processus d’accession au pouvoir, d’exercice et d’alternance du pouvoir permettent une libre concurrence politique et émanent d’une participation populaire ouverte, libre et non discriminatoire, exercée en accord avec la règle de droit, tant dans son esprit que dans sa lettre» (6).
10- Aussi, nous tenons à rappeler que l’Eglise a le devoir moral, de faire remarquer qu’en régime démocratique, aucune réforme qui suscite de fortes tensions et oppositions n’a jamais profité au peuple. A qui et à quoi servirait un changement de la Constitution dans la division, sinon qu’à mettre en péril la paix sociale? Ce serait un recul pour notre pays.
11- La Constitution du 20 janvier 2002, certes, peut être révisée pour des motifs légitimes et opportuns. Cependant, nous estimons qu’il y a un certain nombre de dispositions que nous trouvons fondamentales pour toute démocratie et qui méritent d’être toujours  sauvegardées. Au nombre de ces dispositions, l’on peut citer: L’article 185, en ses alinéas 2 et 3 qui stipulent, respectivement: «Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie, lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire»; «La forme républicaine, le caractère laïc de l’Etat, le nombre de mandats du Président de la République ainsi que les droits énoncés aux titres I et II ne peuvent faire l’objet de révision». Nous devons considérer ces dispositions comme un acquis précieux que nous avons tous à protéger, à défendre et à promouvoir, pour garantir un avenir stable et serein à notre jeune démocratie. Remettre en cause cet acquis serait provoquer un recul devant l’histoire qui ne ferait pas du tout honneur à notre cher beau pays, dans le concert des nations modernes et qui compromettrait notre avenir politique

5- Nos propositions

12- A la suite de Benoît XVI, nous disons, avec force, que «le non-respect de la Constitution nationale, de la loi et du respect des urnes, là où les élections ont été libres, équitables et transparentes, manifesterait une défaillance grave dans la gouvernance et signifierait un manque de compétence dans la gestion de la chose publique» (7).
13- C’est donc sans parti pris et très respectueusement, que nous interpelons notre classe politique sur le projet du changement de la Constitution de 2002. La démocratie suppose le respect du droit et un consensus partagé autour des valeurs cardinales. Comme le recommande la Déclaration universelle sur la démocratie: «La démocratie est un idéal universellement reconnu et un objectif fondé sur des valeurs communes à tous les peuples. Elle est, donc, un droit fondamental du citoyen, qui doit être exercé dans des conditions de liberté, d’égalité, de transparence et de responsabilité, dans le respect de la pluralité des opinions et dans l’intérêt commun» (8).
14- Finalement, ce qui est en jeu, dans ce débat politique actuel, c’est l’épineux problème de l’alternance au pouvoir. De manière explicite, nous, Evêques du Congo, nous proposons que l’alternance au pouvoir devienne une règle intangible et immuable pour notre démocratie: un mandat renouvelable une seule fois. La  grandeur d’une nation s’évalue par sa culture démocratique: organisation libre et transparente des élections, alternance pacifique au pouvoir, garantie des libertés fondamentales, équilibre des pouvoirs, accès libre aux médias, indépendance de la justice… C’est dans cette perspective qu’il est urgent de mettre en place une Commission électorale indépendante et crédible, d’établir des cartes d’électeurs biométriques, pour conjurer les risques de fraude, d’organiser un recensement administratif fiable, et un découpage électoral qui tienne compte de la configuration géographique du pays.
15- C’est, d’ailleurs, la recommandation de l’ensemble de l’épiscopat du continent africain. A ce propos, la lettre pastorale du SCEAM déclare: «Le véritable amour de notre patrie et de notre continent doit nous obliger à préférer une gestion transparente et responsable du pouvoir et à remettre ce pouvoir en toute douceur. Ce qui suppose un strict respect des Constitutions démocratiques nationales» (9).
16- Pour cela, nous attirons l’attention de l’opinion nationale et internationale que ce débat a été la cause des affrontements fratricides de 1993, 1994, 1997 qui ont gravement endommagé le tissu social. Et à l’époque, en 1993, nous avions déclaré, dans notre Appel à la reconstruction: «Notre démocratie sera toujours titubante, si elle ne se construit pas sur le respect total du droit et de la Constitution, et cela de la part de tous les citoyens congolais» (10). Voulons-nous retomber dans cette barbarie humaine? Avons-nous déjà oublié cette parole: «Plus jamais ça»! Quel est ce Congolais qui voudrait revenir à ces malheurs?
Intellectuels chrétiens, hommes et femmes politiques, hommes et femmes de bonne volonté, «Plus jamais ça»! Vous pouvez et devez encore vous asseoir, dialoguer, sereinement, penser aux responsabilités qui vous incombent: celles d’amener notre peuple, notre pays, au bonheur, à la justice, au pardon, à la réconciliation, cette  réconciliation sans laquelle il n’y a pas de paix, comme l’avait affirmé le Saint Pape Jean Paul II: «Pas de paix sans réconciliation».
Sommes-nous prêts à la paix? Congolaises, Congolais du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest, es-tu prêt pour la paix? Veux-tu la paix?
17- Il est vrai que toute période politique provoque des rancœurs chez l’une ou l’autre catégorie de personnes. C’est pourquoi, il est urgent et même indispensable que des périodes de changement politique soient, en même temps, des périodes de réconciliation et de dépassement des conflits. Nous invitons donc notre classe politique à faire preuve de grande maturité pour épargner à notre pays un climat de haine, de revanche et de vengeance et pour assurer la paix, la sécurité et l’honneur à notre cher Dirigeant qui, malgré les limites humaines, a tant fait pour notre pays (paix, stabilité, embellie économique…). C’est le moment de mobiliser toutes nos ressources intellectuelles, spirituelles, pour privilégier la construction nationale, dans la vérité, la paix et la justice.
18-  Pour terminer, nous réitérons cet appel devenu légendaire de notre regretté cardinal Emile Biayenda: «A tous nos frères croyants du Nord, du Centre, et du Sud… Nous demandons beaucoup de calme, de fraternité et de confiance en Dieu, Père de toute race et de toute tribu, afin qu’aucun geste déraisonnable ne puisse compromettre un climat de paix que nous souhaitons tous».
19- Aussi, nous tenons à rappeler que le Christ est lumière des nations (Jn 8,12). Il nous demande, à notre tour, d’être «sel de la terre et lumière du monde» (Mt 5, 13.14). C’est cette lumière que le Christ nous apporte par sa Venue dans le monde que nous célébrons à Noël et que nous voulons transmettre à toutes les filles et tous les fils  du Congo. Car, l’Eglise est, à la fois, signe et rappel du caractère transcendant de la personne humaine. C’est l’homme, «créé à l’image et à la ressemblance de Dieu» (Gn 1,26) qu’il convient de servir et d’aimer avec toute sa dignité (Cf Gaudium et Spes, n.1). Nous invitons les fidèles chrétiens et tous les croyants à une «croisade de prière» pour la paix, la réconciliation et la justice.
Que le Christ, Verbe de Dieu fait chair (Jn 1,14), bénisse notre beau et cher pays!
Et que  la Vierge Marie, notre Mère et Reine de la paix, intercède pour le Congo!
Joyeux Noël et Bonne Année à vous tous!
Fait à Brazzaville, le 8 décembre 2014
Les Evêques du Congo
Notes
1- Montesquieu, L’esprit des lois, P.23.
2- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, n°426.
3- Benoît XVI, Africae Munus, 81.
4- Concile Oecumenique Vatican II, Constitution pastorale Gaudium et Spes, 76.
5- Concile Oecumenique Vatican II, Gaudium et Spes, n°69.
7- Benoît XVI, Exhortation post synodale Africae Munus, n°81.
8- Déclaration Universelle sur la Démocratie, Adoptée et signée au Caire, 1996.
9- Lettre pastorale du SCEAM, Gouvernance, Bien Commun et Transitions démocratiques en Afrique, n°40.
10- Appel à la reconstruction, Parole d’Evêques n°10, P.11.

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