« Se convertir
à l’Amour du Christ »
Préambule:
Le temps de carême n’est autre que ce temps de grâce que Dieu
donne à son Église et à chacun, afin que
nous nous rapprochions davantage de Lui.
C’est un temps pendant lequel l’Église reprend une nouvelle
fois le chemin
qui monte vers
Pâques. Dans son
Message de carême pour cette année 2015, le Pape
François rappelle qu’il « est un temps
de renouveau pour l’Église, pour
les communautés et pour
chaque fidèle » (2 Co 6,
2). Nous sommes donc invités tout
au long de ce temps, à méditer profondément
sur les Paroles du Christ laissées à
son Église, afin
qu’elles éclairent notre itinéraire spirituel
et humain. À
vrai dire, le temps de carême nous appelle à une vraie conversion
intérieure et à une sincère ouverture aux autres. C’est dans ce sens que Saint Jean Paul II dit: « le
temps de carême invite les chrétiens à un accueil plus généreux de ces paroles
évangéliques, pour les traduire
en interventions courageuses
en faveur de
l’enfance menacée et abandonnée ». Il
faut donc noter que ce carême 2015 n’est pas seulement un rappel des événements
d’autrefois, mais il est surtout et avant tout un moment favorable de rencontre
personnelle et communautaire avec le Christ, un “kaïrosˮ.
1. Le
sens des quarante jours de carême:
Le mot carême vient du latin quadragésima ;
il signifie quarantième ; et donc quarantième jour. Ces quarante jours de
grâce nous rappellent les quarante jours de Jésus passés au désert ; et
aussi les quarante
années de la
marche des enfants d’Israël vers la terre promise.
Une longue et pénible
marche, durant laquelle le peuple a eu faim et soif ; il
est allé jusqu’à se détourner de Dieu, le Dieu
de ses pères. Cependant, de tout cela, nous devons ouvrir nos yeux à
l’expérience qu’a connue ce peuple ;
une belle expérience d’amour, de
miséricorde, de tendresse et de fidélité de Dieu à son égard. Le carême c’est
aussi cela : s’abandonner à la miséricorde de Dieu. Pour notre marche de
cette année, nous vous proposons trois pistes de méditation qui peuvent bien nous
aider à vivre ces jours dans une relation plus intime avec Dieu.
2. Le
carême comme temps de conversion:
« Se convertir à l’Amour du Christ » : voila ce qui doit
être pour nous un chemin quotidien. Et
pour y arriver, l’Eglise nous propose plusieurs choses, parmi lesquelles :
l’écoute de la Parole de Dieu et l’obéissance à l’Esprit Saint. Le
temps de carême doit en effet, être caractérisé par ce désir de Dieu. Nous
devons nous laisser conduire par Lui, tout en chassant nos principes de vie qui
sont parfois trop rigides et durs. Nous ne sommes jamais seuls ; le Christ
lutte et combat avec nous sans s’imposer. C’est en lui ouvrant les portes de
nos vies, qu’Il peut dissiper les divisions qui minent nos familles et notre
société.
La
conversion à laquelle nous sommes invités, consiste à nous tourner
vers Dieu et à nous efforcer grâce à Lui, à participer à la
construction de son Royaume dans nos milieux de vie, en posant des
actes
d’amour, de justice, de paix et de miséricorde. En terme clair, cette
conversion doit se manifester par
des attitudes nouvelles et par un
regard de la vie éclairée par l’Esprit du Christ. C’est sur cette route
que la
plupart des Saints que l’Eglise nous propose en exemple, ont marché. Ils
ont
été des témoins visibles de l’Evangile du Christ ; et nous devons à
notre
tour, apprendre chaque jour, à vivre comme eux.
Le Seigneur notre Dieu est
Amour (Cf. 1Jn 1, 14) ; l’Amour est
son nom ; Il fait tout par amour pour les hommes, sans vouloir réclamer
quoi que se soit de notre part. Le plus important pour Lui, c’est notre nouveau
départ ; notre réponse à son appel à la sainteté. Le rappel de cet acte
doit se faire régulièrement. Les prophètes dans l’Ancien Testament ont eu le
mérite d’aider le peuple d’Israël à se souvenir de Dieu comme celui qui
donne en temps voulu; et cela non sans amour. Leur message était plus
accentué sur l’attitude envers Dieu et envers le prochain. Durant ces jours de prière, de pénitence et
de jeûne, nous devons apprendre à voir le visage de Dieu en toute chose,
et chercher à marcher avec Lui. Ces
jours sont à vivre avec une idée claire
de ce que Dieu veut de nous : des hommes et des femmes dignes d’être
appelés fils de Dieu. Prenons donc
conscience que nous sommes des chrétiens baptisés en l’Eglise une, sainte, catholique et apostolique, et que chaque jour
nous sommes appelés à une conversion intérieure beaucoup plus profonde.
La pénitence et la
réconciliation sont des attitudes instituées par le désir de proximité et d’amour
de Dieu. Il s’agit d’un élan de cœur qui
manifeste la recherche permanente de la vie en Dieu. Revenons vers le Seigneur notre Dieu comme
cet enfant prodigue de l’Évangile (cf. Lc 15, 11-32).
3. Le
carême comme temps de prière:
Les moments de prière des premières communautés chrétiennes (cf.
Ac 2, 42s) peuvent bien nous aider à
rencontrer réellement le Seigneur pendant ce temps de carême. Dans cet extrait
des Actes des Apôtres, l’accent est mis sur l’assiduité à la prière et à la fraction
du pain. L’important
dans la prière, n’est
ni le langage, ni le genre
littéraire, mais l’important réside dans la manière d’exposer nos intentions,
pour qu’elles ne soient pas un simple exercice spéculatif, mais un vrai
dialogue intérieur avec le Seigneur. La
prière est donc nécessaire pour notre croissance spirituelle et humaine. Saint
Jacques le dit : « si la sagesse fait défaut à l’un de vous, qu’il la demande au Dieu qui
donne à tous avec simplicité et sans faire de reproche; elle sera donnée » (Jc 1, 5).
La discrétion est aussi l’une
des postures de la prière. En fait, c’est Jésus lui-même qui nous invite
à être discret: « pour toi, quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la
porte, et prie ton Père qui est là,
dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra » (Mt 6,
5). Il ressort que nous ne devrions pas prier
pour être vu des autres. Ce qui est sûr,
c’est que quand nous prions discrètement avec foi et confiance, notre
Dieu écoute et Il répond. Contrairement à la vision des pharisiens et des
scribes, la vraie religion, c’est celle du cœur ; celle qui nous introduit
dans le cœur à cœur avec Dieu, celle qui nous fait entrer dans sa vie par
Jésus-Christ, notre Sauveur.
Le Christ, qui révèle à l’homme sa vraie nature (cf. GS, n°22,
§1), est l’unique modèle à suivre pour le chrétien. Les saints eux, n’ont pas
cessé un instant de s’inspirer de sa vie et de ses enseignements. Ils ont mis leur foi
en lui, et celui -ci les a aidés à vivre pleinement de la vie qui vient de Dieu.
Pendant le carême, nous sommes au désert d’apprentissage, au désert de
l’imitation de Dieu. Le Christ Lui-même, pendant l’exercice de son ministère, n’avait
jamais négligé la prière. Il se retirait tout temps, pour prier à
l’écart: « Et après avoir renvoyé les foules, il monta dans la montagne pour prier
à l’écart. Le soir venu, il était là, seul
» (Mt 14, 23).
La recherche de
Dieu est à
la fois un
exercice individuel et
communautaire. Autrement dit le cheminement personnel n’exclut pas celui
communautaire avec toute l’Église, sa paroisse, sa communauté de base ou son
mouvement d’apostolat. Les moments de prière ensemble permettent de manifester
l’unité de l’Église et de marcher la main dans la main à la suite du Christ qui
nous appelle tous à répondre à notre vocation
à la sainteté.
« Dans les formes diverses de vie et les charges différentes
c'est une seule sainteté que cultivent tous ceux que conduit l'Esprit de Dieu
et qui, obéissant à la voix du Père et adorant Dieu le Père en esprit et en
vérité, marchent à la suite du Christ pauvre, humble et chargé de sa croix,
pour mériter de devenir participants de sa gloire. Chacun doit résolument
avancer, selon ses propres dons et ressources, par la voie d'une foi vivante
qui stimule l'espérance et agit par la charité. » (LG, n°41).
Dans le but de montrer l’importance de la prière dans la vie de
l’homme, Gandhi disait: « sans
la prière j’aurai perdu la
raison. La paix vient de la prière. On peut vivre quelques jours sans
manger et non sans prier. La prière est une alliance entre Dieu et les hommes ».
On peut ajouter à ces mots que la persévérance dans
la prière est l’expression de notre fidélité à Dieu. Aussi, sans la prière, la vie divine ne saurait croître
ou se maintenir en nous. En fait, elle
est un moyen fort pour notre renouvellement et
notre bien-être spirituel. C’est
par elle que
la foi est
vivifiée et que
les bonnes œuvres s’accomplissent. Il
n’y a pas
de christianisme possible
sans prière. La communauté
primitive des Actes
des Apôtres se
réunissait avant tout
pour la prière et le partage du
pain (cf. Ac 2, 42 s).
4. Le
carême comme temps de partage dans l’humilité:
A la notion de prière que
nous venons de développer, il faut ajouter les dimensions de réconciliation et
de partage, pour pouvoir équilibrer les choses. Parlant de la prière que Jésus
nous a enseignée, Tertullien souligne que « Prier ne suffit pas. Il faut aussi pratiquer
l’hospitalité, partager le corps du Christ et nourrir les frères ». La prière est importante dans la vie du
chrétien, puisqu’elle nous fait entrer dans le cœur Dieu, et donc dans la famille des enfants de
Dieu : l’Église. En effet, notre désir de Dieu doit nous mettre sur la
route de nos frères et sœurs, afin de partager avec eux ce que nous avons et ce
que nous sommes. Le carême c’est aussi cela : s’engager pour soutenir ceux
qui sont dans le besoin. C’est un temps où nous devons répandre “l’Évangile de la charité ˮ en
tous lieux ; d’autant plus que l’évangélisation passe aussi par la charité.
Par ailleurs, il faut noter que notre ouverture aux autres ne doit
pas être cantonnée dans un territoire ou dans une région quelconque ; elle
doit plutôt aller au-delà des
frontières tribales et
ethniques. L’amour de son
clan ou de son
ethnie ne doit pas freiner l’élan de cœur du chrétien vis-à-vis des
autres membres de la grande famille des enfants de Dieu, se trouvant en dehors
des repères de sa famille biologique. Il ne doit non plus être un obstacle au
développement de nos sociétés.
Il est bien normal d’aimer les siens ; mais il est encore plus normal et moral de s’ouvrir à
toute personne que l’on rencontre ; de l’aimer comme frère ou sœur, en toute sincérité et l’humilité. Le Christ
nous invite à aimer d’un amour
vrai, sans hypocrisie et sans intérêt. De même, Le prophète Isaïe nous
appelle à partager avec celui qui a
faim, à héberger le pauvre sans abri, à vêtir celui qui est nu (cf. Is 58, 7).
C’est en acceptant de partager cette humanité commune avec les autres, par des
actes concrets de générosité, de charité, de dialogue et de fraternité, que nos
prières peuvent avoir un écho particulier devant le Seigneur. Faisons de notre
temps de
grâce, un vrai moment de jeûne
qui plaît au
Seigneur, en renonçant
à nos représentations parfois non
fondées de l’amour ; et en acceptant d’agir selon le cœur de Dieu.
Conclusion :
Dieu qui appelle et choisit,
a un projet de vie pour chacun. Par conséquent, nous avons l’obligation
d’être à l’écoute de l’Esprit. Car, répondre à notre vocation chrétienne dans
nos milieux de vie, est pour nous le seul moyen d’entrer dans le vouloir de Dieu.
Nous pensons qu’une lecture quotidienne de la Parole de Dieu peut nous aider à
grandir spirituellement et humainement.
Par une vie spirituelle équilibrée, nous
pourrons développer
harmonieusement notre société
et nos familles.
L’histoire nous enseigne que bien
des nations, surtout en Europe, ont été développées en majeure partie, grâce à
un engagement particulier des nouveaux frères convertis au Christianisme. L’appel
du Christ à partager sa vie divine, doit donc nous amener à communiquer la
justice, l’amour et la paix.
Pour terminer, nous vous invitons
chers frère et sœurs, à vous unir à nous lors des croisades de paix que
nous allons organiser pour demander à Dieu de faire don de sa paix à notre
pays. Tournons-nous vers le Seigneur et implorons sa grâce sur nous, la grâce
de la conversion, la grâce de nous aimer comme frères et sœurs, la grâce du
vivre-ensemble, la grâce de la paix et de l’unité, la grâce de bâtir ensemble
notre jeune diocèse.
Que la Vierge
guide nos pas et
intercède pour nous.
Bon temps de
carême !
Monseigneur Urbain NGASSONGO
Evêque du diocèse de
Gamboma