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vendredi 3 novembre 2017

CONFERENCE EPISCOPALE DU CONGO : MESSAGE DES ÉVÊQUES DU CONGO A L’ISSU DE LA 46ème ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DE LA CEC



Préambule

1. À l’issue de notre 46ème Assemblée plénière, tenue à Brazzaville du 9 au 15 octobre 2017, Nous, Évêques du Congo, vous adressons à vous tous, prêtres et personnes consacrées, fidèles laïcs, chrétiens et croyants, femmes et hommes de bonne volonté, ce message de paix et d’espérance, en vue de promouvoir le dialogue œcuménique, pour un mieux vivre ensemble, ainsi qu’une heureuse cohésion sociale. En effet, après avoir parlé du dialogue interreligieux, « condition sine qua non pour la paix dans le monde » (Pape François), nous avons voulu, dans la même dynamique, focaliser notre regard, cette fois-ci, sur « l’œcuménisme, les Églises de réveil et les nouveaux mouvements religieux dans notre pays ».
2. Le choix de ce thème a été motivé par une double raison. Il s’agit, d’une part, d’encourager le dialogue œcuménique et, d’autre part, de proposer des attitudes à adopter, face à la prolifération des communautés religieuses dites Églises de réveil et des nouveaux mouvements religieux dans notre société, à partir d’une analyse socio-culturelle, doctrinale et pastorale.

I/ Contexte général et Position de l’Église

A- L’œcuménisme

3. L’Église catholique a une position claire au sujet de l’œcuménisme, qu’elle considère comme un moyen pour parvenir à l’unité et à la paix. Voilà pourquoi elle soutient tout effort, en vue d’unir les chrétiens. Pour encourager les chrétiens du monde entier à un effort œcuménique, l’Église catholique, non seulement enseigne et prêche, mais organise aussi, en communion avec les Églises et les communautés ecclésiales sœurs des rencontres de prière, de partages, et d’échange. Dans notre pays, nous avons eu des initiatives communes sur plusieurs plans : éducation, santé, culture et même politique. Aux moments des crises, nous organisons des cultes œcuméniques et nous faisons des déclarations communes pour exhorter le peuple congolais à l’unité et à la paix.
4. Le décret sur L’œcuménisme, Unitatis Redintegratio du 21 Novembre 1964 du Concile Vatican II a précisé les principes catholiques de l’œcuménisme, en rappelant la prière que Jésus adressa à son Père avant la Passion « pour ceux qui croiraient en lui  : "que tous soient un comme Toi, Père, Tu es en Moi et Moi en Toi ; Qu’eux aussi soient un en Nous, afin que le monde croie que tu m’as envoyé" (Jn 17, 21). Et, il a institué dans son Église l’admirable sacrement de l’Eucharistie qui signifie et réalise l’unité de l’Église ». (UR ; n°2). Le Concile souligne par ailleurs que Jésus Christ reste éternellement le fondement et le Pasteur de l’Église, unique troupeau de Dieu.
5. Depuis lors, par fidélité à l’enseignement du Christ, l’Église, mater et magistra, et sacrement du salut, n’a cessé d’interpeller les consciences de ses membres sur cette recommandation. Car pour Jésus, l’unité au sein de la communauté apostolique est le signe visible et crédible par lequel on reconnaît les disciples envoyés dans le monde (Jn 13, 35). Le Concile Vatican II assume cette exigence en ces termes : « promouvoir la restauration de l’unité entre tous les chrétiens est l’un des objectifs principaux du saint concile œcuménique de Vatican II » (Décret sur l’œcuménisme, Unitatis redintegratio, n. 1).
6. Aussi, le Magistère de l’Église, à la suite de Vatican II, à travers les enseignements des Souverains Pontifes, a-t-il fait de l’œcuménisme une préoccupation pastorale et un défi pour les chrétiens, car les divisions au sein de l’Église et au milieu des chrétiens et croyants sont une honte et un contre témoignage. Dans sa lettre encyclique sur l’œcuménisme Ut, unum sint, le Pape Jean Paul II écrivait : « Que les disciples "soient un" a été la prière que Jésus a adressée au Père la veille de sa passion (cf. Jn 17,20-23). Il s’agit d’une prière qui nous engage, en constituant un devoir incontournable pour l’Église, qui se sent appelée à consacrer toutes ses énergies pour en hâter l’accomplissement. En effet, vouloir l’unité signifie vouloir l’Église ; vouloir l’Église signifie vouloir la communion de grâce qui correspond au dessein du Père de toute éternité. Tel est le sens de la prière du Christ : "ut unum sint" » (Lettre encyclique Ut unum sint, n. 9).
7. Le Pape François, nous invite à maintenir la voie du dialogue avec les orthodoxes et les protestants, à être ouverts aux Églises évangéliques et pentecôtistes. Dans ses multiples discours, il a non seulement condamné les divisions au sein de la communauté chrétienne mais aussi invité les chrétiens à un effort continuel pour briser les murs qui les séparent, se rapprocher les uns des autres et créer l’unité. Car « l’œcuménisme est un apport à l’unité de la famille humaine » (Lettre encyclique Evangelii Gaudium, n. 245).
8. En harmonie avec le Magistère universel, et en suivant l’enseignement du Concile Vatican II, les Évêques, avec les autres Responsables des autres Églises sœurs, ont lancé, en 1969, l’œcuménisme au Congo. Nous rendons grâce à Dieu pour l’œuvre des Pères de l’œcuménisme au Congo qui, par de nombreux efforts et sacrifices, ont donné naissance au Conseil œcuménique des Églises Chrétiennes du Congo (COECC) en 1970. L’œcuménisme au Congo a eu, parmi ses pionniers, le Cardinal Émile BIAYENDA dont nous venons de célébrer les quarante ans de la mort. En 2020, nous célébrerons le 50ème anniversaire des du mouvement œcuménique au Congo.
9. Depuis 1969, beaucoup d’efforts ont été accomplis pour la compréhension mutuelle. C’est le cas de la reconnaissance de ce que nous avons en commun, à savoir la Parole de Dieu et la profession de foi trinité.
10. Sur le plan social, des initiatives communes ont été aussi prises. Rappelons-nous les démarches pour la paix dans le Pool en 1998, où des membres de la délégation du COECC trouvèrent la mort à Mindouli. Ce vécu marque notre volonté de témoigner du Christ ensemble.
11. Notre mouvement a aussi traversé des moments critiques, comme lorsque l’Église Kimbanguiste a quitté le navire pour poursuivre sa route selon sa propre doctrine. Ce démembrement a fait grandir en nous la conscience de l’unité, qu’il nous faut toujours consolider selon la prière de Jésus lui-même : « qu’ils soient un » (Jn 17,21). Entre temps, la famille du Conseil Œcuménique des Églises Chrétiennes du Congo s’est agrandie avec l’arrivée de l’Église Orthodoxe grecque du patriarcat d’Alexandrie et de l’Église Évangélique Luthérienne. Que dire de tout ce parcours ? Commencé avec quatre Églises membres le mouvement œcuménique au Congo, aujourd’hui passé à cinq, est appelé à grandir.

B- Les Églises de Réveil, les Nouveaux Mouvements Religieux et les sociétés ésotériques

12. Les Églises de Réveil et les Nouveaux Mouvements Religieux connaissent une montée vertigineuse partout dans le monde, ainsi que dans notre pays. La mondialisation et le phénomène grandissant de migration ont accentué cette montée. Face à cette pluralité, aux doctrines qu’ils véhiculent et à leur mode opératoire, la foi et l’identité catholique sont vivement interpelées. Certains chrétiens catholiques vivent aujourd’hui dans une confusion doctrinale ; d’autres ne savent pas ce qui fait la particularité du chrétien « Catholique ».
13. Depuis l’avènement du vent démocratique en 1991, la société congolaise s’est soudainement embarquée dans une effervescence d’associations religieuses. Plus de 350 d’entre elles ont obtenu leur reconnaissance depuis la Conférence nationale souveraine, dont la moitié se trouve à Brazzaville.
14. Le message des évêques du Congo au peuple chrétien, à l’occasion de la célébration du centenaire de l’évangélisation en 1983, soulignait déjà la fragilité de la foi, tant du point de vue de sa qualité que de celui de l’engagement au sein de l’Église et dans la société ; une foi syncrétiste, teintée de pratiques fétichistes, menacée par « la soif de domination, par le pouvoir et par l’argent ; une foi supplantée par la croyance à la sorcellerie. 34 ans après ce message, la question de la pureté de la foi et celle de la pratique sociale de la foi sont encore d’actualité. Les pratiques syncrétiques sont toujours présentes, avec un attrait de plus en plus grand par les mouvements spiritualistes, à caractère ésotérique, initiatique et salvifique. Des religions ancestrales, les sociétés secrètes traditionnelles, et des mouvements religieux plus ou moins syncrétiques, fondés par des Africains, qui proposent souvent à leurs adeptes une fiction du réel, une sorte d’évasion vers un univers mental éthéré et rassurant.
15. Lors de l’Assemblée Plénière du 18 au 24 avril 1988 à Pointe Noire, les Évêques avaient déjà abordé le thème : « la foi catholique face aux Nouveaux Mouvements Religieux au Congo : les sectes ». À cette époque, les Évêques attiraient l’attention des chrétiens sur le danger d’aller vers ces nouvelles réalités religieuses.
16. 20 ans après, Nous, Évêques du Congo, revenons sur ce thème afin d’attirer de nouveau l’attention sur la question, pour mieux vous orienter dans votre marche à la suite du Jésus-Christ, « Chemin, Vérité et Vie » (Cf. Jn 14,6).
17. La deuxième assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des évêques en sa 13ème proposition (sur les 57) demandait déjà que :
• les Pasteurs dans leur diocèse engagent une action pastorale énergique contre tous ceux et celles qui sont impliqués dans la sorcellerie et étudient les mesures disciplinaires qui s’imposent ;
• chaque évêque désigne un exorciste là où il n’y en pas.
• En ce qui concerne la sorcellerie et les cultes : l’Église locale doit s’appuyer sur une approche mesurée qui étudie ce phénomène à la lumière de la foi et de la raison, de telle sorte de libérer les Africains de ce fléau ; et une équipe pastorale diocésaine pluridisciplinaire devra concevoir un programme pastoral qui soit fondé sur la rationalité, la délivrance et la réconciliation.
Les Pères du Synode, par cette proposition, nous suggèrent l’attitude chrétienne à adopter face au pluralisme religieux en Afrique. La question de l’authenticité de la foi chrétienne, suscitée par l’influence des nouveaux mouvements religieux sur les chrétiens prend sa source dans la conception du salut au Congo. Mais qu’est-ce que le salut pour les Congolais ?
18. Le salut, dans notre pays, est souvent conçu sous l’aspect de la résolution des problèmes immédiats et concrets de l’existence. Dans la mesure où le Congolais pense que l’univers est peuplé de toutes sortes d’esprits qui menacent la vie, le salut est réduit à la délivrance d’un mal. Et la célébration liturgique du mystère de la foi ne semble pas se fonder sur l’action de grâce, mais sur une recherche de l’efficacité.
19. La recherche de l’efficacité et de la résolution des problèmes immédiats de la vie conduit les chrétiens à réduire le Père de Jésus-Christ à un « Dieu ad-hoc », que l’on invoque, pour des interventions sporadiques, un « Dieu-solution ». Dieu est invoqué, pour donner immédiatement la bonne santé, la prospérité matérielle, la fécondité. Si la réponse tarde à venir, on passe d’une communauté à une autre, à la recherche de la formule ou de la personne la plus efficace.
20. Même chez les congolais les plus scolarisés, les schèmes de pensée sont encore teintés d’une vision du monde venant des formes dégradées des religions traditionnelles. Et devenir chrétien ne semble pas changer automatiquement toute la conception qu’un individu a du monde. Une telle manière de croire en Dieu a pour conséquence, l’utilisation abusive des sacramentaux reconnus par l’Église, des pratiques rituelles aux allures fétichistes basées sur l’utilisation des huiles et des encens attribués de manière erronée aux Saints Anges, la fuite des responsabilités de la part des chrétiens quant à la transformation de la société selon la visée du Règne de Dieu basée sur la pratique de la charité.
21. En plus, la perception du salut chez le congolais, après analyse, est étroitement liée à celle du mal. Le mal est perçu comme une réalité multiple. Il est ressenti au niveau matériel comme la misère, la faim, le coût excessif des soins de santé, le chômage, l’insuffisance des salaires, la maladie, la stérilité, la difficulté d’éduquer ses enfants. Mais ces réalités font aussi l’objet d’une lecture plus profonde : est mal tout ce qui détruit la vie. Le mal est aussi perçu au niveau des relations sociales : les injustices, l’oppression, le blocage du progrès social, l’insécurité, la violence, la jalousie, les injures. Le mal est également perçu au niveau des valeurs, à travers des expressions qui le situent de façon plus spécifique au niveau moral ou religieux : ce qui est contraire aux normes de la société, le péché, le vagabondage sexuel, l’excès de boisson, la colère, le désir de faire le mal ou, en termes explicitement religieux, ce qui est contraire à la volonté de Dieu. La population congolaise lit ainsi les problèmes de société en termes religieux. Le succès des Églises dites de réveil et des groupes de prières charismatiques n’est pas seulement le résultat des insatisfactions socio-économiques, socio-politiques, culturelles et affectives. Ces églises et ces groupes attirent aussi parce que la population lit ses problèmes en termes religieux, selon la dynamique toujours active des religions traditionnelles africaines. Une telle conception du salut de Dieu soulève un problème œcuménique et pastoral.
22. Concernant les mouvements ésotériques, la position de l’Église demeure identique. Conformément aux Canons 1347, 1364 et 1374, nous rappelons que l’évêque, le prêtre ou le chrétien catholique qui appartient ou milite dans les associations ésotériques s’expose à l’interdiction de recevoir la Sainte Communion et les autres sacrements. Il ne peut pas parrainer un baptême ou une confirmation ; il sera privé des funérailles ecclésiastiques, à moins d’avoir montré quelques signes de repentance ou de pénitence avant la mort (canon 1184, §1). Là où les funérailles ecclésiastiques sont acceptées par l’Évêque, aucun service ésotérique ne sera admis ni à la maison mortuaire, ni à l’église, ni au cimetière juste avant ou après les rites ecclésiaux dans l’intention d’éviter des scandales publics (cf. canon 1184, §1, n° 3 et canon 1374). De plus, en vertu du canon 455 §4, les membres des associations ésotérique ne sont nullement autorisés à être témoins de mariage ni à être membres d’aucune association de fidèles.
23. Tout en félicitant les chrétiens fidèles à la foi catholique, nous voulons aussi les encourager à résister à la tentation d’adhérer à ces mouvements. La deuxième lettre de Saint Paul à Timothée nous invite à la vigilance : « Un temps viendra où les gens ne supporterons plus l’enseignement de la saine doctrine ; mais, au gré de leurs caprices, ils iront se chercher une foule de maîtres pour calmer leurs démangeaison d’entendre du nouveau » (2Tm 4, 3).

II/Orientations pastorales : Appels

24. Filles et fils bien aimés, à la fin de ce message de paix et d’espérance, et dans le souci de parvenir à l’unité, et permettre à chacun d’être fier de sa foi, de ce qu’il est devenu par le baptême, nous lançons un appel à toutes et à tous pour qu’ensemble nous puissions privilégier l’unité et la paix.

1/Aux Prêtres et Personnes consacrées

25. Pour bien mener le travail pastoral dans notre contexte, il est urgent de suivre les recommandations de Saint Paul à son disciple Timothée, à qui il demande de garder le dépôt de la foi avec l’aide de l’Esprit Saint, l’Esprit souverain qu’il a reçu par l’imposition des mains (cf. 2 Tm 1, 14). Ce dépôt est confié par le Christ Seigneur à son Église, fondée sur la foi des Apôtres. C’est donc de l’Église que nous recevons ce que nous devons croire et professer de la foi et de la vie en Jésus-Christ.
26. Nous en appelons à la vigilance et au discernement des curés de paroisses, des responsables d’institutions et des communautés chrétiennes face à certains dons. Que les prêtres et les personnes consacrées accompagnent de leurs prières et de leurs conseils, ceux qui, par ignorance ou par erreur, font partie des mouvements religieux qui s’opposent à la foi chrétienne catholique. Qu’ils soient prêts à éclairer ceux qui sont en recherche. Que les prêtres, eux-mêmes, évitent le mimétisme de certaines pratiques non conformes à la foi catholique. Qu’ils sachent, comme le Christ, Maître et Seigneur, rejeter le péché, tout en aimant le pécheur en quête de conversion.
27. Nous demandons aux prêtres, et plus particulièrement aux curés, de faire preuve de discernement requis pour chaque cas, afin d’exercer la pastorale, en ayant toujours à l’esprit et au cœur la loi suprême de l’Église, à savoir le salut des âmes (Cf. canon 1752). Mais qu’ils sachent faire preuve de rigueur dans l’annonce de la vérité, dans la fidélité à l’Église, Corps du Christ. Qu’ensemble, nous prenions humblement conscience que nos faiblesses et scandales contribuent à la perte de la foi chez les fidèles laïcs, et à leur départ de l’Église.

2/Aux chrétiens et aux autres croyants

28. Aux chrétiens. Le mouvement œcuménique au Congo continue son cheminement irréversible vers l’unité. Nous sommes appelés, nous ses membres, à le consolider. L’unité parfaite, la pleine communion est entre les mains du Seigneur. Il la fera advenir dans la forme et dans le temps qui lui appartiennent. Pour notre part, nous y travaillons de toutes nos forces, avec la conscience que « rien de ce qui est réellement chrétien ne s’oppose jamais aux vraies valeurs de la foi, mais tout cela peut contribuer à faire pénétrer toujours plus parfaitement le mystère du Christ et de l’Église » (cf. Unitatis Redintegratio, n. 4). Le fondement de toute action œcuménique, c’est le dialogue, la compréhension et l’estime mutuelles. Au-delà de toutes nos différences, « il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu qui est Père de tous et qui est en tous » (Ep 4,5).
29. Ayant fait l’expérience du mouvement œcuménique basé sur le dialogue et l’entente, ayant fait l’expérience de la prière avec les autres chrétiens, en dépit de nos différences, mais unis dans la proclamation de la Seigneurie du Christ, soyons les témoins et les défenseurs de l’unité et de la paix dans un Congo qui en a tant besoin. En effet, nous sommes appelés à « garder l’unité dans l’esprit par le lien de la paix » (Ep 4,3). Le plus grand témoignage que nous puissions donner de notre appartenance au Christ, c’est de nous aimer. C’est ainsi que le monde saura que nous sommes ses disciples (Jn 17, 23) et se convertira à lui.
30. Aux croyants. À chacun, quelle que soit sa religion, nous rappelons notre message de l’année dernière : la violence au nom de Dieu est un blasphème contre Dieu. Comme le disait Saint Jean Paul II : « la paix du monde dépend aussi de la paix entre nous » (cf. Message sur le dialogue islamo-chrétien, novembre 2016). Notre devoir à tous est de construire un monde de paix, uni et solidaire, un monde où il fait beau vivre pour chacun, un monde où l’on se préoccupe surtout des plus petits, des plus pauvres. Ce n’est pas de l’utopie mais un idéal de vie et un engagement à suivre lentement et doucement, car « Parcourir le chemin prend du temps. C’est un engagement à long termes ; Plus difficile est le chemin qui conduit à la paix et à l’entente, plus nous devons-nous engager à reconnaitre l’autre, à guérir les blessures et à construire des ponts, à serrer les liens et à nous entraider » (Pape François, Evangelii gaudium, n. 67).

3/Aux familles

31. Chères familles chrétiennes, vous êtes une bénédiction pour ce monde. En effet, par le mystère de l’incarnation, Dieu a voulu naître dans une famille (Jn 1, 14), et veut que chacun ait une famille lieu propice d’éducation, d’épanouissement et de transmission des valeurs. La famille est aujourd’hui menacée de tous côtés, certaines menaces viennent des idéologies laïques et anticléricales, d’autres des déviances diverses de la société actuelle. À vous chers membres des différentes familles, conscients de vos difficultés, nous vous exhortons, par la miséricorde de Dieu, à préserver l’unité dans les familles et à rechercher l’unité, la solidarité avec d’autres familles. Nous vous interpellons aussi à éviter le syncrétisme dans votre spiritualité, mais à être fidèle à l’enseignement de Jésus-Christ, reçu des Apôtres. Chères familles catholiques, n’ayez pas peur des autres confessions religieuses qui nous entourent, et dont les bons fruits sont visibles. Elles peuvent aussi être une bénédiction et une occasion pour grandir dans la foi et affermir sa foi. Soyez ouverts au dialogue avec tous et toutes, avec les autres confessions chrétiennes, et avec toutes les catégories sociales.
32. Résistez au racisme, au tribalisme et au régionalisme, qui nous empêchent d’évoluer et de bâtir un Congo uni. Tout ce que Dieu veut et attend de nous c’est l’unité dans son amour. Dieu veut la paix, l’amour, la justice, l’unité, et là où il y a l’unité Dieu est présent. Et là où manque l’unité c’est le diable qui règne. Que vos familles soient des écoles où l’on apprend à être ensemble, à bien vivre ensemble dans l’unité et la paix et que chacun de vous se considère bâtisseur de l’unité et non de la division. Que la Sainte famille de Nazareth vous aide à vivre dans l’unité et à témoigner de cette unité.

4/Aux Enfants et Jeunes

33. Chers Jeunes et enfants, vous avez reçu des enseignements précieux au catéchisme. Ils aident à vivre dans la foi et avec les autres sans distinction aucune, de religion, de sexe, de race et de tribu. Par votre Baptême, vous êtes devenus membres de l’Église, Corps du Christ. Vous avez choisi d’appartenir au Christ. N’acceptez jamais de perdre ni d’éteindre la lumière reçue lors de votre Baptême.
34. Avec le Christ, « Demeurez prêtres, prophètes et rois » dans vos différents milieux de vie, au milieu de vos parents et amis. Que les nombreuses communautés qui vous entourent, qui prêchent la haine et la division, ne vous fassent pas perdre le chemin de votre paroisse, de votre foi, et ne vous détournent pas de votre Église. Gardez votre fidélité en Dieu et en l’Église, comme nous le professons dans notre Credo : « Je crois en l’Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique ». Nous prions pour vous ; vous êtes l’avenir de notre société, de l’Église et du monde. Que le Seigneur vous aide à grandir en grâce, en intelligence et en sagesse comme l’Enfant Jésus (Lc 2, 52).
35. Chers étudiants, soyez des modèles du travail bien fait, témoins de la paix et de l’unité dans vos divers milieux de vie. Le Christ est présent là où deux ou trois sont réunis (Cf. Mt18, 20). Gardez-vous des faux prophètes (cf. Mt7, 15-20) La différence de religion ne doit jamais vous faire perdre le sens de l’unité et de la paix, que nous avons toujours cherchés pour nos familles, nos Églises et notre pays.
36. À cause de la crise sociale, économique et financière, des difficultés liées à vos conditions estudiantines et à votre avenir, vous êtes souvent soumis à de grandes tentations, où vos vies sont exposées. Ne désespérez jamais devant les situations difficiles de la vie. Mettez votre foi en Dieu et cultivez l’espérance en un avenir meilleur. Avec le pape François nous exhortons : « Continuez à aller de l’avant ! Ne vous laissez pas tromper, ne perdez pas la joie, ne perdez pas l’espérance, ne perdez pas le sourire » (Pape François, Discours aux autorités colombiennes, l’Osservatore Romano, du jeudi 14 septembre 2017, p. 3).
36. Avec la grâce du Christ-Rédempteur, résistez au mal et à toutes les mauvaises sollicitations, résistez aux propositions d’une vie facile qui vous fait perdre votre dignité humaine et chrétienne. Résistez à tout ce qu’on vous promet au prix de vos vies et des vôtres. Résistez aux sacrifices qu’on vous propose pour de la richesse facile. Sachez qu’on ne peut pas appartenir à une société sécrète, à une secte initiatique et être chrétien. Il y a une incompatibilité entre la foi chrétienne et la Franc-maçonnerie, la Rose-Croix, la Fraternité blanche universelle (FBU), le Mahikari, Eckankar, les Témoins de Jehova, et bien d’autres sociétés sécrètes et sectes initiatiques. Avec la grâce de Dieu, faites un effort de ne pas vivre en contradiction avec l’Évangile. La vie dans la foi au Dieu de Jésus-Christ demande de vivre dans la vérité, sans confusion, ni syncrétisme. Soyez fiers et jaloux de votre vie de foi, et soyez fiers de votre jeunesse. Nous vous assurons de notre prière et de notre bénédiction paternelle.

5/ Aux cadres et hommes politiques

37. Après plusieurs enquêtes dans le milieu des acteurs politiques de notre pays, il apparaît que la gouvernance politique est renvoyée au second plan, au profit de l’occultisme. Voilà plusieurs années, des groupes ésotériques et autres fraternités ont comme envahi le monde politique, distillant des doctrines pour le moins pernicieuses, face auxquelles le chrétien doit s’interroger et se situer, en cohérence avec sa foi. Hommes politiques chrétiens, dans ce monde où vous évoluez et vers lequel vous êtes envoyés par le Christ, soyez « la lumière du monde et le sel de la terre » (cf. Mt 5, 13.16). Vous êtes confrontés à des sollicitations pressantes et acharnées de la part de nombreuses confréries de courants d’idées et de systèmes de pensées divers, qui vous proposent des mirages de réussite terrestre ; vous devez savoir que, pour la plupart, ces sociétés initiatiques, qui prétendent apporter le salut terrestre à leurs membres, dissimulent étrangement des pratiques fétichistes : elles n’offrent que des biens de la terre, des biens caducs et périssables, mais les biens éternels de l’au-delà leur échappent.
38. Certains parmi vous se sont déjà engagés dans des mouvements ésotériques. Quelles que soient les raisons qui vous ont amenés à faire un tel choix, quels que soient les pactes déjà scellés et les degrés de votre appartenance à telle ou telle obédience, nous vous exhortons ardemment à rebrousser chemin, à l’instar de l’enfant prodigue (Cf. Luc 15, 11-32). Avec le Christ, n’ayez pas peur de rompre tous les liens qui vous tiennent captifs. Car « si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres » (Cf. Galates 5, 1). Revenez donc au Christ, la seule et unique source de votre salut (Cf. Actes 4, 12).
39. Vous les grands dignitaires, vous qui décidez du destin de notre pays, nous vous exhortons à vous laisser conduire par l’Esprit de Dieu, à favoriser l’unité et la cohésion sociale.

6/Aux femmes et hommes de bonne volonté

40. Le monde se trouve aujourd’hui à un carrefour, au point que la réalité de l’identité religieuse pose problème. Chaque religion est confrontée aux valeurs positives des autres religions. Les hommes et les femmes, quels que soient leurs statuts sont perturbés par la menace syncrétiste qui postule l’égalité de toute spiritualité au nom des principes du « Bien et de l’unicité de Dieu ».
41. Vous n’êtes pas à l’abri de la tentation du syncrétisme religieux, qui promet à l’homme une vie meilleure et un bonheur terrestre obligatoire. Gardons présent à l’esprit que notre mission commune est de rechercher la vérité, de créer des occasions qui favorisent l’unité et la paix. Le monde est aujourd’hui divisé, et notre pays n’est pas loin de cette tentation.

CONCLUSION

42. Filles et fils bien aimés, au terme de ce message, nous réaffirmons avec force, courage et fierté tout engagement et tout effort en vue de l’unité des chrétiens. Une exigence que tous nous devons respecter et suivre par fidélité au message de Jésus-Christ, pour le bien de notre Église et de notre société. L’unité des chrétiens est un témoignage vivant de l’amour de Dieu pour tous. Notre pays le Congo, a besoin des hommes et des femmes qui prient, qui cherchent la vérité, et qui s’engagent pour la promotion de la paix, de l’unité véritable et de l’amour.
43. Ne tombez pas dans l’apostasie (la négation de la foi chrétienne) à cause de la multiplicité des groupes religieux. Au contraire, vous devez témoigner, dans vos milieux de vie, de votre foi en Jésus-Christ, mort et ressuscité, et lutter contre la division, le mensonge et la calomnie qui prennent corps entre les croyants des confessions différentes. Que la Sainte Vierge Marie, notre Dame du Rosaire prie pour nous.
Que «  la grâce de Jésus-Christ notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père et la communion du Saint-Esprit soit toujours avec vous  », et qu’Il bénisse à jamais le Congo et ses enfants.
Fait à Brazzaville le 15 octobre 2017

Les Évêques du Congo

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